Transistors et portes logiques

On entend souvent dire que l'informatique, ce n'est que des 0 et des 1. Dans les cours précédents, nous avons appris à compter en binaire, et vu avec le code ascii et le codage utf-8 que l'on pouvait représenter des chaînes de caractères avec des 0 et des 1. Nous allons voir que cette histoire de 0 et de 1 n'est pas qu'une lubie mathématique mais correspond aussi à une réalité physique. Par ailleurs, grâce aux travaux de BOOLE, on peut effectuer des opérations avec ces 0 et ces 1.

Le transistor et ses deux états

Lorsque l'on utilise des zéros et des uns, on se réfère en fait à un système qui peut avoir deux états. Ces états, que l'on choisit de nommer 0 et 1 pourraient aussi être appelés vrai ou faux (et on verra qu'il y a un lien). On peut aussi relier ces deux états à une réalité physique : un courant qui passe ou un courant qui ne passe pas (un interrupteur). Dans la pratique, les deux états que l'on utilise en informatique seront représentés par une tension dans le monde matériel. Par convention, l'état que l'on nomme 0 correspondra à une tension nulle, et l'état que l'on nomme 1 à une tension +V, fixée par le systèe utilisé.

Le tube à vide

Pentode EF86, Reinhard Brunsch, Domaine public

Pentode EF86

Pour pouvoir avoir ces deux états, il faut disposer d'un interrupteur. Mais pour que le système soit intéressant, il ne faut pas un interrupteur mécanique, qui serait actionné par un être humain ou par un moteur. Il faut disposer d'un interrupteur controlé électriquement. Ainsi, le passage ou non d'un courant, la présence ou non d'une tension, sont controlés par un courant et on peut combiner tout cela pour faire des systèmes complexes.

Historiquement, la première technologie qui a permis cela était celle des tubes à vides, en particulier les triodes. Ces dispositifs à trois bornes avaient l'une des trois bornes qui jouait le rôle d'interrupteur électrique. Pour des raisons de stabilité et de perfomances, des bornes supplémentaires ont été rajoutées. La pentode est créée en 1926 par Bernard Tellegen de la société Philips.

Ces tudes à vide ont permis de créer les premiers ordinateurs. Jusqu'à l'avènement du transistor à la fin des années 40, les ordinateurs étaient des monstres de plusieurs tonnes (30 tonnes pour l'ENIAC!) qui occupaient des salles entières. Mais le principe est là : on a des interrupteurs controlés électriquement.

remarque

Si ces tubes ne sont plus utilisés aujourd'hui en informatique, on les trouve encore utilisés pour des traitements de haute fréquence et des amplificateurs de puissance, particulièrement dans le domaine de la HI-FI.

Les transistors

Schéma de principe du transistor, Laurent COOPER, domaine public

Schéma de principe du transistor

Les transistors que l'on trouve dans les circuits des ordinateurs se comportent comme des interrupteurs qui laissent passer ou non du courant électrique, selon un mode tout ou rien. Le schéma de principe donné ci contre montre les trois éléments caractéristiques du transistor :

  • La base B. Lorsqu'elle est sous tension haute (+V), elle laisse passer le courant entre la broche E et le collecteur (relié ici à la masse). Ceci a pour effet de placer E sous tension basse
  • La broche E est appelé l'émetteur, et se trouve sous tension haute (+V)
  • Le collecteur, relié à la masse

En pratique, des résistances font qu'il n'y a pas une tension nulle, pour éviter les courts-circuits, mais une tension très faible que l'on considère comme nulle.

Si l'on considère que la tension +V représente un 1 et la tension nulle représente un 0, ce transistor permet de faire une opération simple :

  • Si l'entrée (B) est à 0, la sortie est à 1
  • Si l'entrée est à 1, la sortie est à 0

Logique booléenne

Les travaux de Georges BOOLE au XIXème siècle visaient à rendre la logique calculable et démontrable. Il a ainsi créé une algébre (dite booléenne) qui travaille avec des 0 et des 1. Le 1 peut être considéré comme représentant VRAI et le 0 comme représentant FAUX. Les opérations de l'algébre booléenne sont ainsi les opérations de la logique classique.

Dans le cas de notre transistor, il réalise une opération élémentaire de la logique Booléenne qui est le NOT. En logique booléenne, on représente les opérateurs avec des tables de vérité. On parle de porte logique NOT, dont voici le schéma et la table de vérité

Porte NOT, Laurent COOPER, domaine public

Porte NOT, notation américaine (ANSI) et européenne

Porte NOT
P Q
0 1
1 0

Portes logiques

En combinant plusieurs transistors, on arrive à réaliser des opérations un peu plus complexe. Nous allons voir en particulier comment sont créées les portes logiques qui représentent les opérations logiques de base.

La porte NAND

Schéma de principe de la porte NAND, Laurent COOPER, domaine public

Porte NAND

En combinant deux transistors en série, on fait la porte logique NAND (abbréviation de NOT AND, c'est à dire NON ET). En logique, on a P ET Q qui est vrai si et seulement si P est vraie ET Q est vraie aussi. Le NAND (non et) correspond à la négation de cette opération. La table de vérité est donc :

NAND
P Q non (P et Q)
0 0 1
0 1 1
1 0 1
1 1 0

Cette table de vérité correspond bien à nos deux transistors en série :

  • Si P vaut 0 ou Q vaut 0, le courant ne circule pas entre la masse et R. R vaut donc 1.
  • Il n'y a que si P et Q sont simultanément à 1 que le courant circule, et donc que R vaut 0
Porte NAND, Laurent COOPER, domaine public

Porte NAND, notation américaine (ANSI) et européenne

La porte NOR

En combinant deux transistors en parallèle, on fait la porte logique NOR (abbréviation de NOT OR, c'est à dire NON OU). En logique, on a P OU Q qui est vrai si et seulement si P est vraie ou Q est vraie, les deux pouvant être vrai (on parle de ou non exclusif) . Le NOR (non ou) correspond à la négation de cette opération. La table de vérité est donc :

NOR
P Q non (P ou Q)
0 0 1
0 1 0
1 0 0
1 1 0

Cette table de vérité correspond bien à nos deux transistors en parallèle :

  • Si P vaut 1 ou Q vaut 1, le courant circule pas entre la masse et R. R vaut donc 0.
  • Il n'y a que si P et Q sont simultanément à 0 que le courant circule, et donc que R vaut 1.
Schéma de principe de la porte NOR, Laurent COOPER, domaine public

Porte NOR

Porte NAND, Laurent COOPER, domaine public

Porte NOR, notation américaine (ANSI) et européenne

Porte AND

Les deux portes NOR et NAND que nous venons de voir sont des portes simples à construire et sont des portes qui permettent de tout construire en électronique. En pratique on construit deux portes importantes avec NOR et NAND. Tout d'abord, la porte AND qui correspond au ET logique classique. Elle peut être construite à partir de 3 portes NOR

Schéma de principe de la porte AND, Laurent COOPER, domaine public

Porte AND à partir de 3 portes NOR

AND
P Q P et Q
0 0 0
0 1 0
1 0 0
1 1 1
Porte AND, Laurent COOPER, domaine public

Porte AND, notation américaine (ANSI) et européenne

remarque

Notez bien sur la sortie le symbole du rond (en ANSI) qui signifie qu'il y a une négation. La porte AND et la porte NAND ne se différencie que par ce rond. Pour la notation européenne, c'est le trait oblique qui indique la négation en sortie.

Porte OR

De la même façon, la porte OR (le OU logique) peut être construite à partie de 3 portes NAND

Schéma de principe de la porte OR, Laurent COOPER, domaine public

Porte OR à partir de 3 portes NAND

OR
P Q P et Q
0 0 0
0 1 1
1 0 1
1 1 1
Porte OR, Laurent COOPER, domaine public

Porte OR, notation américaine (ANSI) et européenne